LA POLITIQUE
 PORTUAIRE FRANCAISE 
  | 
  
  | 
  
   
  | 
  
   
 II. - LES MOYENS DACTION DES
 POUVOIRS PUBLICS 
 D'finir et mettre en uvre
 un cadre juridique adapt', participer financi'rement aux investissements sont les deux
 moyens daction essentiels de lEtat en mati're portuaire. 
 A. -
 la r'glementation 
 La r'glementation a 'volu'
 sans r'forme densemble : la r'flexion sur les structures de gestion reste
 embryonnaire, la r'forme du r'gime de travail de la manutention est inachev'e et
 nest pas toujours appliqu'e, tandis que celle du r'gime domanial demeure
 partielle. 
 1'
 Les structures de gestion 
 En vertu des textes qui les
 r'gissent, les ports autonomes ainsi que les ports dint'r't national rel'vent
 juridiquement de la responsabilit' de lEtat. Lutilit' de cette distinction
 et lorganisation interne de ces deux structures de gestion nont donn' lieu '
 aucune r'flexion de lEtat depuis la d'centralisation intervenue en 1983. Or
 lad'quation de ces r'gimes de gestion aux n'cessit's 'conomiques ainsi que le
 d's'quilibre des processus de d'cision des gestionnaires de ports, au profit
 dint'r'ts trop strictement locaux ou particuliers, posent aujourdhui
 question. 
 a) Missions et organisation des
 ports dint'r't national 
 La distinction inadapt'e entre
 ports autonomes et ports dint'r't national 
 Comme l'volution des
 trafics analys'e plus haut le montre, les crit'res et la justification de la distinction
 entre ports autonomes et ports dint'r't national, telle qu'tablie en 1965,
 ne sont plus 'vidents. Dune part, la n'cessit' pour lEtat de conserver au
 niveau national la gestion dun nombre aussi 'lev' de ports ne para't pas
 'tablie. Dautre part, et surtout, il ny a pas dad'quation entre
 limportance des ports, mesur'e en termes dactivit' ou de fili're, et le
 classement d'coulant de leur statut, ce qui conduit ' mettre en cause lexistence
 de deux statuts diff'rents pour les ports qui rel'vent de la comp'tence de lEtat. 
 Des propositions ont 't' faites
 dans le pass' de ne conserver que trois ports dint'r't v'ritablement national
 (Marseille/Fos, Le Havre/Rouen et Dunkerque) et de r'gionaliser tous les autres en
 transf'rant les ressources correspondantes (16), ou encore daugmenter le nombre des
 ports autonomes et de d'centraliser tous les autres (17) vers les d'partements. 
 M'me si la pertinence de ces
 suggestions peut 'tre discut'e, la Cour constate que lorganisation portuaire
 fran'aise ne sest en rien adapt'e ' l'volution des trafics : bien que
 d'pass'e, la distinction entre ports autonomes et dint'r't national est
 maintenue. 
 La cat'gorie des ports
 dint'r't national a 't' fond'e sur des crit'res de trafic remontant au d'but
 des ann'es soixante-dix. En effet, ant'rieurement ' la d'centralisation de 1983, des
 mesures de d'concentration administrative avaient conduit en juillet 1971 ' r'partir
 les ports non autonomes en deux cat'gories. Les uns, treize ports de cat'gorie I,
 'taient " consid'r's comme dint'r't national " et douze
 dentre eux sont devenus ports dint'r't national en 1984 : Calais, Boulogne,
 Dieppe, Caen, Cherbourg, Brest, Concarneau, Lorient, La Rochelle, Bayonne, Port La
 Nouvelle, S'te ; seul F'camp avait 't' d'centralis', alors que la proposition
 initiale de lEtat comprenait 'galement Concarneau. Les autres, ports de cat'gorie
 II, 'taient " consid'r's comme dint'r't r'gional " ;
 pourtant, cinq dentre eux sont devenus ports dint'r't national en 1986 :
 Saint-Malo, Toulon, Nice, Ajaccio, Bastia. Dans une r'ponse de janvier 1990 aux
 observations de la Cour relatives aux investissements des ports non autonomes pour les
 exercices 1982 ' 1986, le ministre charg' de la mer rappelait les crit'res selon
 lesquels les ports avaient 't' class's en 1983 :  
 - n'cessit' de ma'triser les
 trafics essentiels ' l'conomie nationale, mesur's par les seuils dun
 million de tonnes de marchandises et un million de passagers ; or ce seuil, r'vis' par
 exemple en fonction de la croissance du trafic portuaire depuis 1983 (9 % en moyenne sur
 1984-1996 - 43 % pour les seuls ports dint'r't national), soit 1,1 million de
 tonnes ou de passagers, devrait aujourdhui conduire ' 'liminer de la liste
 plusieurs ports dint'r't national (au minimum Concarneau, Toulon, Nice et
 Ajaccio) ; 
 - importance des liaisons entre
 la France continentale et ses 'les et d'partements 'loign's ; 
 - int'r't de certains sites
 pour la d'fense nationale (Toulon, Le Fret et Roscanvel) ; 
 - principe dunit'
 dexploitation des sites portuaires, entra'nant le classement dun ensemble
 portuaire d's lors quil existait une activit' dint'r't national. 
 La pertinence de ces crit'res et
 leur port'e sur la classification actuelle devrait 'tre r''tudi'e. Cette
 recommandation est dautant plus dactualit' que lEtat entend davantage
 fonder ses crit'res de s'lection des investissements sur la notion de fili're de
 produits, plut't que sur des crit'res de trafic total ou de statut des ports. 
 Lexercice de la tutelle par
 les services de lEtat  
 Lexistence du statut des
 ports dint'r't national pose dautant plus question quune harmonisation
 des conditions de leur gestion dans le sens dun rapprochement avec celle des ports
 autonomes appara't au contraire souvent souhaitable. En t'moignent d'j' le projet
 dextension du contenu des concessions doutillage public des ports
 dint'r't national ' lensemble des installations portuaires, ou encore les
 extensions ' ces m'mes ports de dispositions relatives ' la gestion du domaine des
 ports autonomes. Il est surprenant que, malgr' ces 'volutions, les diff'rents projets
 de r'forme portuaire naient engag' aucune r'flexion sur la modification des
 cat'gories de ports.  
 En effet, la diff'rence majeure
 entre les ports dint'r't national et les ports autonomes tient toujours ' la
 ma'trise par les ports autonomes de la majeure partie des pouvoirs de gestion du domaine
 qui leur est affect'. En revanche, la gestion du domaine public non conc'd' des ports
 dint'r't national est 'clat'e : elle rel've des services d'concentr's du
 minist're de l'quipement, pour la relation quotidienne avec loccupant du
 domaine et les travaux dentretien ou dinvestissement n'cessaire au maintien
 du patrimoine public, dune part ; et de ceux de la direction g'n'rale des imp'ts,
 pour les actes de gestion courante, les actes dacquisition et de cession,
 dautre part. Les premiers cumulent de surcro't les fonctions de tutelle des
 concessionnaires et de ma'tres duvre ou conducteur dop'rations pour
 ces m'mes concessionnaires. 
 Une autre diff'rence avec les
 ports autonomes tient au fait que lEtat nest pas membre des conseils
 portuaires des ports dint'r't national, m'me si le pr'fet ou son repr'sentant -
 en g'n'ral le chef du service maritime - assiste de plein droit aux s'ances du conseil.
 Les d'cisions concernant un port dint'r't national sont prises directement par le
 concessionnaire. Le conseil portuaire est comp'tent pour 'mettre des avis. Mais il
 nest compos' que de repr'sentants des usagers, des collectivit's locales et des
 repr'sentants du personnel. 
 Les proc'dures de tutelle des
 d'cisions des ports dint'r't national m'ritaient en outre d'tre revues.
 En effet, jusquau d'cret du 9 septembre 1999, la tutelle de la plupart des
 d'cisions des concessionnaires relevait encore du ministre. C'tait le cas des
 autorisations de travaux (article R. 122-1). Pourtant, lEtat dispose au niveau local
 de services d'concentr's confi's ' des chefs de service maritimes (directeur
 d'partemental de l'quipement, chef de service sp'cialis' du minist're charg'
 des ports maritimes ou directeur de port autonome). D'sormais, davantage de d'cisions
 sont de la comp'tence du pr'fet : autorisations doutillage priv' avec obligation
 de service public (article R. 122-12), pouvoir dopposition aux tarifs et conditions
 dusage projet's, prise en consid'ration des avant-projets et autorisation des
 travaux de construction, dextension et de modernisation (article R. 122-1), sauf
 travaux r'alis's dans les " ports principaux m'tropolitains ",
 entra'nant une modification substantielle dans les acc's ou ouvrages du port ou dont le
 co't total est sup'rieur ' 15 millions de francs.  
 Linad'quation du r'gime
 des concessions appliqu' aux ports dint'r't national 
 Lexploitation des ports
 dint'r't national fait lobjet de concessions dites doutillage public,
 r'glement'es par les articles R. 122-7 ' R. 122-11 du code des ports maritimes et
 par un cahier des charges type, en cours de r'vision (18), vis' ' larticle R.
 122-8 dudit code. Ces concessions reviennent ' confier ' un tiers la r'alisation ou
 lacquisition de biens appel's ' 'tre remis gratuitement ' lEtat en
 contrepartie de la perception par ce tiers, pendant un temps d'termin', de redevances
 aupr's des usagers de ces biens. 
 L'tendue insuffisante
 des concessions 
 Progressivement se sont
 d'velopp'es des concessions comportant des aspects domaniaux, comme les terre-pleins
 portuaires, ou la voirie, qui est exclue g'n'ralement des concessions, mais dont
 lentretien est souvent r'alis' sur fonds de concours du concessionnaire.
 Cest ainsi qu' Calais, les terre-pleins r'siduels ainsi que la voirie
 portuaire, entretenus par la chambre de commerce et dindustrie (CCI), pourraient
 'tre introduits dans la concession, ce qui permettrait de clarifier les comp'tences du
 concessionnaire. En 1990-1991, ce dernier a ainsi 't' amen', sur le budget dune
 concession portuaire particuli'rement florissante, ' financer pour un montant
 denviron 100 MF la rocade de contournement de Calais, qui b'n'ficie pour
 lessentiel au trafic portuaire, et dont la CCI est par ailleurs le ma'tre
 douvrage en attendant sa remise ' lEtat. 
 La ma'trise de lespace et
 des revenus qui sy attachent 'tant devenue une question centrale de
 l'conomie portuaire, il para't logique quun acteur portuaire unique dispose
 de la gestion des terre-pleins, au-del' du simple outillage public. Cette pratique des
 ports autonomes et de certains ports dint'r't national, qui assure lunit'
 'conomique des ports concern's, devrait donc 'tre 'tendue ' lensemble des ports
 dint'r't national.  
 Les relations
 Etat-concessionnaire 
 Pour ses concessions portuaires,
 lEtat per'oit des redevances, fix'es par les cahiers des charges. Leur montant est
 extr'mement variable, et parfois purement symbolique. Certaines redevances devraient
 'tre r'vis'es compte tenu du niveau suffisant d'quipement des ports, de
 laccroissement des revenus domaniaux et de lexistence dactivit's
 r'mun'ratrices, comme la plaisance. Cette r'vision est particuli'rement n'cessaire
 pour les concessions accord'es ' des exploitants priv's dans des conditions beaucoup
 plus favorables quun simple titre doccupation pr'caire : les conditions
 initiales de r'mun'ration, justifi'es au moment de la mise en place des installations
 par limportance des frais de premier 'tablissement, prennent, en effet, au fil du
 temps, le caract're dune aide indirecte au b'n'ficiaire.  
 Allant en ce sens, un projet de
 nouveau cahier des charges-type devrait comporter une redevance fond'e sur un pourcentage
 forfaitaire de 3 % des recettes tir'es des seules occupations privatives par le
 concessionnaire. La Cour recommande que les revenus et la dur'e de la concession soient
 en outre pris en compte. 
 En cas de sous-concession, la
 reddition des comptes par le sous-concessionnaire est souvent d'ficiente comme il a 't'
 constat' pour les ports de Brest, de S'te, de Toulon et dAjaccio (port de
 plaisance Charles Ornano). D's lors, la tutelle exerc'e par les services de lEtat
 sur la concession est vid'e de sa substance. 
 Les r'gles doctroi et de
 renouvellement des concessions 
 Loctroi et le
 renouvellement des concessions et des sous-concessions portuaires pose aujourdhui
 des probl'mes juridiques, auxquels lEtat ne sest pas attaqu' : le premier
 est celui de lapplication des r'gles de transparence des d'l'gations de service
 public ; le second concerne les situations dans lesquelles les concessionnaires, apr's
 expiration de leur titre et sans quil ait 't' renouvel', continuent ' exercer
 leur activit' avec un risque de gestion de fait des deniers publics. 
 Les concessions doutillage
 public sont des d'l'gations de service public. D's lors, lattribution des
 concessions par lEtat ou par les ports autonomes doit suivre les r'gles de
 publicit' pr'vues par larticle 38 de la loi n' 93-122 du 29 janvier 1993 relative
 ' la pr'vention de la corruption et ' la transparence de la vie 'conomique et des
 proc'dures publiques. La port'e de cette obligation est cependant att'nu'e par la
 pratique du recours aux chambres de commerce et dindustrie (CCI) ' titre de
 concessionnaire. En effet, larticle 41 de la loi du 29 janvier 1993 dispose que la
 proc'dure de publicit' ne sapplique pas lorsque le " service est confi'
 ' un 'tablissement public et ' condition que lactivit' d'l'gu'e figure
 express'ment dans les statuts de l'tablissement ". Le Conseil
 constitutionnel (19) a consid'r' cette disposition non contraire au principe
 d'galit' d's lors que les 'tablissements publics " sont dans des
 situations diff'rentes des autres organismes susceptibles dobtenir des
 d'l'gations de service public au regard des objectifs de transparence et de concurrence
 poursuivis par la loi ". En revanche, les personnes priv'es candidates
 ' loctroi dune d'l'gation de service public restent soumises ' des
 formalit's compl'tes.  
 N'anmoins, dune mani're
 g'n'rale, la mise en concurrence syst'matique pour loctroi dune
 d'l'gation de service public, inexistante jusqu' une 'poque r'cente, devient
 progressivement la norme. D's lors, m'me sil ny est pas contraint par la
 loi, lEtat pourrait avoir int'r't ' soumettre aux m'mes formalit's de
 publicit', de son propre gr', son choix de recourir ' une CCI, afin de v'rifier que
 l'tablissement public est effectivement le meilleur candidat. Cette 'volution
 pourrait conduire ' remettre en cause, dans les faits, le recours syst'matique ' une
 CCI.  
 Le recours ' la concurrence pour
 loctroi des sous-concessions remet en cause les pratiques anciennes,
 particuli'rement nettes dans le cas du port de plaisance de Toulon, o' le conc'dant a
 d', sous la pression du sous-concessionnaire, renoncer ' une mise en concurrence pour
 lattribution dune nouvelle concession. 
 Les r'gles doctroi des
 sous-concessions sont insuffisamment encadr'es. De la m'me mani're que les titres
 doccupation temporaire du domaine public, ces conventions ne sont pas soumises aux
 proc'dures doctroi des d'l'gations de service public. L'largissement aux
 titres doccupation domaniale des proc'dures de d'l'gation de service public
 nentre pas dans le champ des textes aujourdhui en vigueur. Pourtant, le
 recours syst'matique ' la sous-d'l'gation, par des sous-concessions quasi-compl'tes,
 vide de son sens la proc'dure de d'l'gation de service public et permet de contourner
 lobligation de transparence pos'e par la loi.  
 En r'ponse ' la Cour, les
 directions du budget et du tr'sor du minist're de l'conomie, des finances et de
 lindustrie se sont d'clar'es favorables ' la d'finition de r'gles de
 d'volution des concessions portuaires conformes au droit interne et communautaire de la
 concurrence. Il serait souhaitable que cette r'forme aboutisse sans tarder.  
 Le retard pris dans le
 renouvellement de certaines concessions conduit en outre ' des situations pr'judiciables
 ' lEtat. Le terme des trait's 'tant connu d's lorigine, ainsi que la
 consistance des biens de retour et de reprise revenant ' lEtat, il peut para'tre
 'tonnant que leur expiration aboutisse ' un vide juridique. Tel est pourtant le cas dans
 un certain nombre de ports, dans lesquels un ancien d'l'gataire, souvent candidat ' sa
 propre succession, poursuit sans titre son activit', parfois pendant plusieurs ann'es.
 Plusieurs exemples ont 't' relev's : en particulier celui de la concession de
 p'che du port de Cherbourg ' la CCI du Cotentin, qui a continu' son activit' et a
 engag' des travaux dinvestissement de 15 MF, malgr' lexpiration de la
 concession, et celui de la concession du port de S'te. 
 Deux causes peuvent 'tre
 trouv'es ' cette situation : lune tient ' labsence danticipation de
 la part des services de lEtat, qui nentament pas assez t't des proc'dures de
 plus en plus complexes. Lautre correspond au mode de n'gociation parfois pratiqu'
 par lancien et futur concessionnaire, qui joue de labsence de mise en
 concurrence pour accro'tre ses exigences vis-'-vis de lEtat, sans courir le risque
 de voir appara'tre un concurrent.  
 Dans ces diff'rents cas de
 poursuite de lactivit' dun ex-concessionnaire sans titre, lEtat se
 retrouve confront' ' plusieurs risques juridiques et financiers : 
 - sa responsabilit' civile peut
 'tre mise en cause pour les activit's portuaires exerc'es dans les b'timents de la
 concession ; 
 - lamortissement des
 emprunts contract's dans le cadre de la concession est assur' par
 lex-concessionnaire, alors m'me que lEtat, apr's expiration, se trouvait
 automatiquement subrog' dans les obligations de son concessionnaire. Ce point a 't'
 relev' ' Concarneau, o' un programme de modernisation a 't' engag' en 1989 pour un
 montant de 100 MF : lEtat a laiss' son concessionnaire sengager, alors m'me
 que la concession avait expir' en 1983, n'tait prolong'e qu' titre
 provisoire et aurait d' 'tre en cours de renouvellement. Il importe que ce cas,
 qualifi' d " isol' " par la DGI, ne se renouvelle pas. 
 - enfin, les recettes de la
 concession (droits de ports, taxe d'quipement des ports de p'che) sont per'ues
 sans titre par lancien concessionnaire. M'me si cet 'tat de fait sexplique
 par la poursuite de lactivit' de lex-concessionnaire, il nen demeure
 pas moins que des ressources publiques sont mani'es sans titre et d'tourn'es des
 caisses du comptable public auxquelles elles 'taient destin'es. Cest 'galement
 vrai pour les recettes domaniales. La prorogation du titre de concession, ou, ' tout le
 moins, une autorisation accord'e par ladministration centrale comp'tente de
 poursuite de lactivit' dans le souci de maintenir la continuit' du service public,
 aurait 't' indispensable. Au minimum, lenvoi dinstructions au service
 d'concentr' concern' par la direction charg'e des ports aurait 't' n'cessaire. 
 b) Missions et organisation des
 ports autonomes 
 Les missions des ports autonomes 
 Laccroissement du r'le
 commercial des ports autonomes conduit ' sinterroger sur la n'cessit', dune
 part, de simplifier les dispositions du code des ports maritimes relatives aux prises de
 participation et, dautre part, de pr'ciser le r'gime fiscal qui leur est
 applicable. 
 En ce qui concerne les
 initiatives commerciales des ports, la Cour a constat' que certains risques incitent '
 maintenir la proc'dure dautorisation pr'alable pour la cr'ation de filiales. En
 revanche, il est clair que la d'cision des tutelles, qui est du domaine des actions
 commerciales, doit pouvoir 'tre prise rapidement. Or, la lourdeur de la proc'dure
 dautorisation a souvent conduit les 'tablissements ' prendre des participations
 sans autorisation. La d'l'gation de ce pouvoir dautorisation au commissaire du
 Gouvernement et au contr'leur dEtat, comme cest maintenant le cas pour le
 pouvoir dapprobation des comptes d'l'gu' par la direction du budget au
 contr'leur dEtat, permettrait de simplifier et dacc'l'rer la proc'dure
 dapprobation. La direction des ports semblait suivre la Cour sur ce point en 1997 :
 une d'concentration de lautorisation du ministre des finances au contr'leur
 dEtat en dessous dun certain seuil faisait partie des propositions pr'par'es
 au titre de la r'forme portuaire. 
 En mati're fiscale, du fait de
 leur caract're industriel et commercial, les 'tablissements portuaires devraient 'tre
 assujettis aux imp'ts directs. Cet assujettissement r'sulte, en effet, de la combinaison
 des articles 165-1 (" nonobstant toute disposition contraire, les
 'tablissements ayant un caract're industriel et commercial sont passibles de tous les
 imp'ts directs et taxes assimil'es applicables aux entreprises priv'es
 similaires ") et 167 (" sont notamment soumis au r'gime pr'vu '
 larticle 165-1 (...) les chambres de commerce et dindustrie et les ports
 autonomes ") de lannexe IV du code g'n'ral des imp'ts.
 N'anmoins, les ports autonomes nacquittent pas ces imp'ts, une d'cision
 minist'rielle du 11 ao't 1942, reconduite depuis, exon'rant temporairement les ports de
 cette obligation. La Cour a relev' le caract're exorbitant de cette mesure,
 labsence de fondement juridique de cette tol'rance (20) et le risque financier de
 redressement quelle comporte. 
 En octobre 1998, la direction
 g'n'rale des imp'ts a propos'" de mettre en place un groupe de
 travail associant les services de la direction g'n'rale des imp'ts (dont le service de
 la l'gislation fiscale) ainsi que les organismes portuaires afin d'laborer une
 doctrine claire et uniforme ' partir de laquelle la r'gularisation pourrait 'tre
 effectu'e sans ambigu't' par ladministration fiscale ". Il
 importe que ce groupe traite de la totalit' des imp'ts directs, et non pas seulement de
 la taxe fonci're. 
 Les organes de d'cision des
 ports autonomes 
 Si la politique g'n'rale des
 ports est d'finie par lEtat, leur gestion est confi'e ' un 'tablissement public,
 dot' dun conseil dadministration et dun directeur.  
 Le conseil dadministration
 est, de fait, domin' par les usagers portuaires. Sa composition, d'j' critiqu'e par la
 Cour dans son rapport public de 1990, r'sulte de larticle L. 112-2 du code des
 ports maritimes qui, r'servant au d'cret le soin de pr'ciser le nombre et la qualit'
 des membres, pose un principe de parit' : la moiti' des membres est d'sign'e par les
 chambres de commerce et dindustrie, les collectivit's locales et les repr'sentants
 du personnel ; lautre moiti' est compos'e de repr'sentants de lEtat et
 de personnalit's choisies parmi les principaux usagers du port ou d'sign'es en raison
 de leur comp'tence dans les probl'mes portuaires, de la navigation maritime, des
 transports, de l'conomie r'gionale ou de l'conomie g'n'rale.  
 Larticle R. 112-1 fixe '
 vingt-six au total le nombre - que la Cour avait estim' tr's 'lev' dans son rapport
 public de 1990 - des membres, nomm's par d'cret :  
 - quatre membres choisis par les
 chambres de commerce et dindustrie dont deux au moins parmi les usagers (chiffre
 abaiss' ' deux, dont un usager, par d'cret du 5 f'vrier 1999) ;  
 - cinq par les collectivit's
 (r'gion, d'partement, principale ville) et 'tablissements publics territoriaux ;  
 - trois repr'sentants des
 salari's du port (cinq depuis le m'me d'cret) ; 
 - un repr'sentant des ouvriers
 dockers ;  
 - trois repr'sentants de
 lEtat (un membre du Conseil dEtat, un repr'sentant du ministre de
 l'conomie et des finances cest-'-dire en pratique le tr'sorier payeur
 g'n'ral du d'partement, et le pr'fet de r'gion) ;  
 - deux personnalit's choisies
 parmi quatre usagers sur une liste 'tablie par les chambres de commerce et
 dindustrie (trois choisies sur une liste de cinq depuis le m'me d'cret) ; 
 - huit personnalit's qualifi'es
 dont quatre usagers au moins (sept depuis le m'me d'cret).  
 Larticle R. 112-2
 pr'cise la notion d"usager" : entreprises des r'gions desservies par le
 port, armements fran'ais, agences fran'aises des compagnies de navigation,
 professionnels de la marine marchande, entreprises de transports terrestres, soci't's
 concessionnaires doutillage public, entreprises de services portuaires et notamment
 de manutention, de transit, de consignation, dexploitation dentrep't public
 des douanes, courtiers maritimes. 
 En r'alit', trois groupes
 dadministrateurs peuvent 'tre distingu's :  
 - les repr'sentants de
 lEtat, peu nombreux, ne sont pas toujours directement concern's par les enjeux
 portuaires et ne disposent pas toujours des comp'tences techniques n'cessaires ; 
 - les repr'sentants des
 collectivit's territoriales sont g'n'ralement peu impliqu's dans la gestion portuaire,
 soit parce que leurs int'r'ts d'passent la place portuaire (r'gion et d'partement),
 soit parce quils ne souhaitent pas apporter de financement (commune), ou biaisent au
 contraire les choix strat'giques du port par une vision d'lib'r'ment optimiste des
 enjeux, comme cest le cas ' Dunkerque ; 
 - lensemble des autres
 administrateurs, soit dix-sept, si lon met ' part le cas des repr'sentants des
 salari's, repr'sentent de fait les usagers portuaires. Le pr'sident appartient en
 g'n'ral ' cette cat'gorie. 
 En revanche, bien que nomm's par
 lEtat, le commissaire du gouvernement et le contr'leur dEtat ne sont pas
 membres du conseil dadministration, mais assistent avec voix consultative aux
 s'ances, ainsi qu' celles des commissions constitu'es au sein du conseil. Ils en
 re'oivent les d'lib'rations. En droit, le commissaire du gouvernement peut y faire
 opposition dans les huit jours, avant quelles ne deviennent de plein droit
 ex'cutoires ; en pratique, il ne fait pas usage de ce droit. Pour sa part, le contr'leur
 dEtat peut demander linscription ' lordre du jour des questions sur
 lesquelles il estime n'cessaire de provoquer une d'lib'ration.  
 Limportante repr'sentation
 des int'r'ts particuliers locaux et des usagers au sein du conseil dadministration
 conduit ' un risque 'lev' de paralysie, provoqu' par des conflits dint'r't
 entre administrateurs, ainsi qu' un risque de d'cisions favorables ' une
 cat'gorie dusagers mais contraire aux int'r'ts de l'tablissement. Entendu
 par la Cour, un pr'sident de conseil dadministration reconnaissait lui-m'me que le
 conseil dadministration, marqu' par les int'r'ts locaux et ceux du personnel,
 n'tait pas uni par lid'e que lentreprise portuaire devait gagner de
 largent, mais se montrait plut't soucieux de ne pas oublier de le d'penser. 
 Cette surrepr'sentation
 entra'ne aussi pour les personnes amen'es ' prendre part ' la gestion sous une forme
 quelconque le risque potentiel de situations de prise ill'gale dint'r't,
 constituant linfraction r'prim'e par larticle 432-12 du nouveau code p'nal.
 Dans plusieurs cas, le contr'leur dEtat et le commissaire du Gouvernement ont ainsi
 't' amen's ' avertir certains membres de telles situations. 
 Cette forte repr'sentation des
 int'r'ts particuliers conduit aussi ' renforcer la concurrence entre ports fran'ais.
 En outre, le conseil dadministration nest plus le garant de la pr'servation
 des int'r'ts de l'tablissement public et na d's lors plus de l'gitimit'
 pour d'cider. La responsabilit' est transf'r'e de fait au directeur, que lEtat
 peut effectivement sanctionner en mettant un terme ' ses fonctions. Des d'cisions
 essentielles, telles que le calendrier des op'rations dinvestissement, sont prises
 en r'alit' par le directeur. Cette discordance dangereuse entre organe d'lib'rant et
 directeur entra'ne une moindre transparence de la gestion et, paradoxalement, une moindre
 capacit' de lEtat de peser sur les d'cisions. 
 Des probl'mes se posent en
 particulier en mati're de tarification et de ristournes lorsque ces derni'res sont
 effectu'es, parfois sans que le conseil dadministration en ait connaissance, au
 b'n'fice des membres du conseil dadministration ou de leurs mandants. 
 Le d'calage entre les d'cisions
 du conseil et la r'alit' de la gestion concerne 'galement les programmes
 dinvestissement. Ainsi, ' Dunkerque, les pr'visions adopt'es par le conseil ont
 syst'matiquement affich' une enveloppe dinvestissements maximale. Cette politique
 budg'taire pr'sente linconv'nient majeur d'viter de choisir clairement
 entre les investissements, malgr' les recommandations constantes, r'p't'es et
 conjointes du contr'leur dEtat, du commissaire du gouvernement et du tr'sorier
 payeur g'n'ral. Cette pratique nest pas acceptable, surtout lorsquelle
 r'pond au seul souci dafficher vis-'-vis des clients ou partenaires locaux une
 politique ambitieuse de d'veloppement. 
 Pour que le conseil
 dadministration puisse avoir un r'le effectivement op'rationnel et agisse dans
 lint'r't de l'tablissement public, une r'forme de sa composition appara't
 n'cessaire, prioritairement dans le sens dune r'duction du nombre des membres du
 conseil. LEtat d'tient en effet un certain pouvoir de r''quilibrage de la
 composition du conseil dadministration, soit par des textes, soit par les choix de
 nomination qui rel'vent de sa comp'tence.  
 Plusieurs principes fondateurs de
 lorganisation des conseils pourraient en la mati're 'tre pris en compte : 
 - la repr'sentation devrait
 'tre proportionnelle ' lint'r't port' aux activit's portuaires ; de ce point
 de vue, la question se pose de savoir sil ne convient pas de r''quilibrer la
 repr'sentation des collectivit's territoriales en fonction de leur comp'tence en
 mati're dintervention 'conomique et de transport ; 
 - la composition devrait
 refl'ter le poids des acteurs et des modes de financement sur lactivit' portuaire
 ; or, les usagers et personnalit's qualifi'es actuellement choisis repr'sentent de
 mani're privil'gi'e les int'r'ts strictement locaux ou particuliers au d'triment
 dacteurs 'conomiques dont les d'cisions ont un impact direct sur le port, m'me si
 elles sont prises physiquement hors de la r'gion portuaire ; ainsi, le secteur des
 transports et de la logistique est-il sous-repr'sent' ; 
 - la coexistence des int'r'ts
 priv's avec lint'r't g'n'ral du port et de lEtat devrait 'tre encadr'e,
 pour 'viter tout conflit dint'r't. 
 A ce stade, seul ce dernier point
 a guid' les projets de texte r'glementaires 'labor's en 1997, dont une partie a
 finalement abouti aux d'crets des 5 f'vrier et 9 septembre 1999. Le premier texte
 accro't la repr'sentation des salari's, de fa'on ' rapprocher les ports des r'gles
 impos'es par la loi sur la d'mocratisation du secteur public du 26 juillet 1983.  
 Un nouvel article R. 112-7-1 du
 code des ports maritimes oblige maintenant chaque administrateur ' communiquer au
 commissaire du Gouvernement, d's sa d'signation : dune part, une d'claration
 mentionnant les fonctions que lui-m'me ou son conjoint exerce dans des soci't's ou
 organismes susceptibles - du fait de leur secteur dactivit' - de conclure des
 conventions avec le port autonome ; dautre part, la liste et le nombre des
 actions et droits sociaux que les m'mes et leurs enfants mineurs d'tiennent ' hauteur
 dun vingti'me au moins du capital ou des droits de vote dans ces soci't's ou
 organismes.  
 En outre, pour les candidats aux
 fonctions de pr'sident, vice-pr'sident et secr'taire du conseil dadministration,
 le commissaire du Gouvernement informe le conseil dadministration, pr'alablement au
 vote, de ce quun candidat, sil venait ' 'tre 'lu, lui para'trait
 susceptible de sexposer, dans ses fonctions de membre du bureau, '
 lapplication des dispositions de larticle 432-12 du code p'nal relatives au
 d'lit de prise ill'gale dint'r't. 
 Lautre aspect des projets
 de 1997, figurant dans le d'cret n' 99-782 du 9 septembre 1999, concerne lexamen
 et les conditions dadoption des conventions ou toutes d'cisions ' caract're
 financier dans lesquelles un administrateur est int'ress', directement ou indirectement.
 D'sormais, un membre du conseil dadministration ayant connaissance dun projet
 de convention entre le port et une soci't' ou un organisme mentionn' dans la
 d'claration quil a souscrite, doit en aviser le commissaire du Gouvernement et le
 contr'leur dEtat, qui en informent, par 'crit, le conseil dadministration.
 Il doit en outre sabstenir de participer ' tous les actes relatifs ' la
 n'gociation et ' la conclusion de cette convention. 
 Cette modification de la
 composition du conseil dadministration demeure n'anmoins tr's limit'e au regard
 de linadaptation actuelle des organes dirigeants ' une gestion responsable,
 efficace et resserr'e du fonctionnement et des investissements des ports autonomes, et
 tr's en-de'' de ce quil serait souhaitable de faire. 
 Enfin, au regard des
 dysfonctionnements observ's dans la gestion et l'tablissement des comptes des
 ports autonomes (cf. deuxi'me partie), il serait opportun denvisager de transformer
 ces 'tablissements, soit par une modification du statut des 'tablissements, qui
 resteraient des 'tablissements publics industriels et commerciaux mais sans la pr'sence
 dun comptable public, soit, plus radicalement, par la suppression du statut
 d'tablissement public, ce qui conduirait ' transformer les ports autonomes en
 soci't's ' capitaux publics soumises au r'gime de droit commun des soci't's.  
 Recommandations 
 - r'examiner lad'quation
 de lorganisation statutaire des ports fran'ais ' leurs besoins 'conomiques et aux
 objectifs de lEtat, ainsi que lint'r't de maintenir les cat'gories (ports
 autonomes, ports dint'r't national) au sein desquelles les ports de lEtat
 sont actuellement class's ; 
 - modifier le r'gime de concession des ports dint'r't national ('largir la
 concession ' la gestion du domaine, red'finir les relations entre services de
 l'quipement et services fiscaux, imposer la reddition des comptes des
 sous-concessions), voire transformer les ports qui le justifient en ports autonomes ; 
 - acc'l'rer lentr'e en vigueur du nouveau cahier des charges type des
 concessions, dont la r'vision est achev'e depuis 1990, et appliquer le droit interne et
 communautaire de la concurrence aux concessions portuaires ; 
 - r'former la taille et la composition des conseils dadministration des ports
 autonomes, de fa'on ' les rendre op'rationnels et davantage garants de la pr'servation
 des int'r'ts des 'tablissements publics (r'duction du nombre des membres,
 r''quilibrage au profit dint'r'ts moins strictement locaux ou particuliers) ; 
 - revoir le statut des ports autonomes en les transformant soit en 'tablissements publics
 industriels et commerciaux d'pourvus de comptable public, soit en soci't's ' capitaux
 publics soumises au r'gime de droit commun des soci't's ; 
 - pr'ciser le r'gime fiscal applicable aux 'tablissements portuaires. 
  
 (16) Rapport r'alis' ' la demande du ministre de la mer par
 M. Dupuydauby, rendu public en d'cembre 1986.
 (17) Rapport de M. Beaufils,
 Assembl'e nationale, 1989. 
 (18) Le cahier des charges type a
 't' publi' initialement en annexe ' une circulaire du 30 janvier 1915, modifi'e
 le 8 d'cembre 1958. Sa r'vision, entam'e en 1988, a 't' achev'e en 1990, mais sans
 'tre encore adopt'e. 
 (19) D'cision n' 92-316 DC du
 20 janvier 1993. 
 (20) TA de Strasbourg, 1er
 septembre 1995, port autonome de Strasbourg c/ direction g'n'rale des imp'ts. 
   
 
  |